L'@ide-Mémoire

ENCYCLOPÉDIE DU CINÉMA FRANÇAIS

 

 

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Hommages
 

 

Renée Lebas

Véritable nom : Renée Leiba.

Née à Paris le 23 avril 1917.

Décédée à Paris (16ème) le 18 décembre 2009.

Inhumée au Cimetière du Montparnasse.

Elle était née Renée Leiba et avait grandi à la Bastille, entre des parents d’origine juive roumaine (père tailleur, mère couturière) et une sœur plus jeune qu’elle. Passée par divers petits métiers, allant du secrétariat au journalisme, en passant par la danse, elle avait, comme plus tard Mireille Mathieu, Georgette Lemaire ou Amandine(uh) Bourgeois été révélée par un radio-crochet, et de là effectué ses premiers d’interprète professionnelle sur scène. Signée par Pathé en mai 1940, mais contrainte peu après à l’exil par les lois raciales de Vichy, réfugiée en Zone Sud, puis à Lausanne, c’est finalement loin de France qu’elle enregistre ses premiers succès, De l’autre côté de la rue, Insensiblement, Exil, 14 Juillet… Entre temps, à l’instar des parents d’Esther Gorintin, disparue trois semaines après elle, son père et sa jeune sœur, victimes de la rafle du Vel’ d’Hiv’ eu juillet 1942, ont disparu dans les camps de la mort. Plus tard, Renée Lebas évoquera la Shoah (il semble qu’elle ait été la première à le faire via le disque et la scène) à travers une chanson – La Fontaine de Varsovie – écrite et composée pour elle par Emil Stern et Eddie Marnay, et fera fréquemment appel au folklore yiddish ayant bercé son enfance. Rentrée en France dans l’euphorie de la Libération, elle est première artiste à enregistrer un disque dans des studios parisiens et, forte d’un répertoire composé avec autant de soin que d’exigence, entame dans le même temps une tournée en règle des hauts lieux de la Capitale, enchaînant passages à l’ABC, au Théâtre de l'Étoile, à l’Européen, à l’Alhambra, à Bobino… Au final, elle aura interprété Francis Carco, auquel elle consacrera un album entier, et Francis Lemarque, son ami du temps des associations ouvrières fleuries dans le sillage du Front Populaire, Charles Aznavour et Charles Trenet, dont elle aura été la première à chanter La Mer (que la maison de disques du Fou chantant l’empêchera d’enregistrer afin d’éviter toute forme de " doublon "), Jacques Brel et Boris Vian, qui lui apporte sur un plateau La Valse folle, puis tard rebaptisée par lui La Valse à Renée. Dans un portrait circonstancié paru dans L’Humanité en 2004, Hélène Hazera expliquera en partie son immense popularité, au cours des quinze ou seize ans qui suivirent la Libération, par sa façon, quasi révolutionnaire pour l’époque, de (ré)concilier Rive Droite et Rive Gauche : d’un côté, des refrains entraînants, faciles à retenir, de l’autre, les textes plus ardus – Elle tourne la Terre – d’un Léo Ferré débutant auquel, le nez décidément creux, elle est la première à donner véritablement sa chance. Respectée de ses pairs, elle était l’une des deux seules chanteuses – avec Lucienne Delye – à laquelle Piaf permettait à Aznavour d’apporter ses textes. Brel, de son côté, confiera volontiers préférer sa version de La Valse à mille temps à la sienne. En 1963, s’estimant probablement trop âgée pour chanter l’amour, Renée Lebas effectue sur la pointe des pieds ses adieux à la scène, se consacrant d’abord à la production d’artistes débutants – au choix Régine, qui fera elle aussi beaucoup pour concilier folklore yiddish et variété française, ou Serge Lama – puis à l’importation de films d’animation tchèque. Disparue dans sa 93ème année et dans la plus absolue discrétion, Renée Lebas aura en définitive connu le sort des artistes trop tôt retirés, dont on a peu à peu oublié le visage (vu si rarement à l’écran de surcroît), et dont le nom lui-même finit par ne plus dire grand chose aux moins de soixante ans. Les chansons, du moins les plus connues d’entre elles, restent, dont le compact disc a, via de très judicieuses rééditions de fonds de catalogues (expression horrible s’il en est…), su pérenniser la trace. Il n’empêche : une grande dame s’en est allée bel et bien dans allée dans le siècle… un siècle qui, par la force des choses, n’était plus tout à fait le sien.

FILMOGRAPHIE

1947 : Le Duel au pistolet (Jean Bardou, CM). 1948 : Cité de l’Espérance (Jean Stelli). 1951 : Valse dans la nuit/Unter den tausend Laternen/Die Stimme des Anderen (Erich Engel, apparaît uniquement dans la version française).

© Armel de Lorme