L'@ide-Mémoire

ENCYCLOPÉDIE DU CINÉMA FRANÇAIS

 

 

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Hommages
 

 

Pierre Maguelon

Véritable nom : Maurice Marcel Couzinié.

Né à Labruguière (Tarn) le 3 septembre 1933.

Décédé au centre hospitalier de Perpignan (Pyrénées-Orientales) le 10 juillet 2010.

Disparition, dans sa 77ème année, du comédien Pierre Maguelon, victime d’une hémorragie cérébrale survenue alors même qu’il participait au Festival de Théâtre de Saint-André (Pyrénées-Orientales) dont il était l’invité d'honneur. Too bad. Natif du Tarn, l’acteur avait entamé une longue et prolifique carrière à la fin des années 50, sous le pseudonyme de Petit-Bobo, conservé jusqu’au milieu de la décennie suivante. Rapidement passé du cabaret – où il se liera d’amitié avec un autre Méridional à moustache, le Sétois Georges Brassens, dont il assurera en outre les premières parties – au studio, Pierre Maguelon, archétype de l’acteur toujours impeccable, se sera illustré au final dans une cinquantaine de petits rôles au grand écran, enchaînant sans lasser les Français moyens tantôt débonnaires, tantôt obtus, parfois les deux à la fois…

Lancé au grand écran par Truffaut, de Givray, de Broca et surtout Étaix (on peut rêver pire…), aperçu chez Cavalier, apprécié de Korber, demandé et redemandé par Yves Robert et Claude Sautet, c’est au choix l’ami compatissant recueillant sans bâiller les confidences amoureuses d’un copain en plein désarroi (Le Téléphone rose, Édouard Molinaro, 1975) et le terrifiant contremaître d’usine bouffant à longueur de journée, sans jamais se poser de question, du crouille et du bicot (sic), guerre d’Algérie oblige (Élise ou la Vraie Vie, Michel Drach, 1969). Prolo idéal, il hante avec la même jovialité le restaurant populeux du Tracassin ou les Plaisirs de la ville (Alex Joffé, 1961), la cour d’immeuble et le bistrot de quartier de Domicile conjugal (François Truffaut, 1970) et les fêtes champêtres de ce Pays bleu (Jean-Charles Tacchella, 1976) dans lequel, marié à Dora Doll et gratifié par elle d’une abondante progéniture, il fait office d’agriculteur " du cru ", mais n’en néglige pas pour autant la fréquentation intensive des commissariats où l’on moleste le suspect : restaurateur chez les uns, ouvrier chez les autres, c’est en définitive dans les emplois de flic, du planton borné (Les Assassins de l’Ordre, Marcel Carné, 1970) au gradé persuadé d’avoir raison en tout quoi qu’il advienne (Comme un boomerang, José Giovanni, 1976 ; Le Pull-over rouge, Michel Drach, 1979), qu’on finit toujours par le retrouver. Le grand Buñuel ne l’imagine pas autrement, qui l’établit tour à tour caporal de la Garde civile espagnole (La Voie lactée, 1968) et brigadier sanglant/sanguinolent (Le Charme discret de la bourgeoisie, 1972), avant de le rétrograder sans crier gare – sacré Don Luis ! – au rang de simple pandore tour à tour crétin, concon et hébété pour ne pas dire parfaitement idiot (Le Fantôme de la Liberté, 1974). De façon assez cocasse, c’est l’année même du tournage de son troisième et dernier Buñuel que Pierre Maguelon se voit choisi pour camper, aux côtés de Jean-Claude Bouillon et de Pierre Maguelon, le Marcel Terrasson couillon, finaud et sympathique, des six saisons – réparties sur une décennie entière – des Brigades du Tigre de Claude Desailly et Victor Vicas, dont le succès ne fut pas pour rien dans son immense (et somme toute tardive) popularité. Époque bénie où les premiers flics cathodiques de France n’étaient pas interprétés au choix, merci TF1, par de vieilles gloires aigries et suffisantes (leurs carrières, en revanche, nettement moins…) rescapées d’un souvent désastreux cinéma de papa et unaniment détestées de la profession, d’anciens taulards à (trop) forte mâchoire ou d’ex-mannequins jambon délicieusement vulgaires mais démesurément fessu(e)s. Laissant à d’autres, bien moins subtils, le soin de prendre le relais, Pierre Maguelon, rendu à la vie civile au mitan des années 80, devait quant à lui continuer à fréquenter assidument le gratin du cinéma français, effectuant sans se lasser, près de deux décennies durant, d’incessants allers-retours entre le Midi vu par Jacques Demy (Trois Places pour le 26, 1988) et le Sud-Ouest cher à Téchiné (Alice et Martin, 1997) comme aux frères Larrieu (Fin d’été, id.). Sans parler des courts métrages, enchaînés dès l’aube des années 2000, et des planches, fréquentées jusqu’au bout, entre passion, constance et grand discernement.

Carbon de Castel-Jaloux rêvé dans l’affreux Cyrano de Bergerac de Jean-Paul Rappeneau (1989), rehaussé de plusieurs crans par sa seule présence au générique, impeccable Fauvet d’une très surfaite Petite Voleuse (Claude Miller, 1988) marquant son retour tardif dans la galaxie Truffaut, disparu depuis, on regrettera un peu qu’il n’ait jamais eu l’occasion de jouer Panisse, rôle semblant avoir été écrit pour lui, mais l’on pourra tout aussi raisonnablement imaginer qu’il sut se consoler de cet oubli de la profession en prêtant, pour le petit écran, ses traits au grand-père Pagnol du Temps des secrets puis du Temps des amours (Thierry Chabert, 2006), après avoir figuré au cinéma le François-des-Bellons du diptyque La Gloire de mon père/Le Château de ma mère (Yves Robert, 1989). À l’heure des comptes, des bilans et des traits que l’on tire au bas de la page, il s’est souvent vu des palmarès bien moins éclectiques et, partant, moins glorieux que le sien. Chapeau bas, dirait l’autre. Et il aurait raison.

FILMOGRAPHIE CINÉMA :

Sous le pseudonyme de Petit-Bobo. 1960 : Le Président (Henri Verneuil, présence non formellement établie & a priori sujette à caution). 1961 : Cartouche (Philippe de Broca). Tire-au-flanc 62 (Claude de Givray et François Truffaut). Le Tracassin ou les Plaisirs de la ville (Alex Joffé). 1962 : Le Soupirant (Pierre Étaix). Le Roi du village (Henri Gruel). 1963 : Bébert et l’omnibus (Yves Robert). 1965 : Le 17ème Ciel – Un garçon, une fille (Serge Korber). Monnaie de singe (Yves Robert).

Sous le nom de Pierre Maguelon. 1967 : Alexandre le Bienheureux (Yves Robert). Mise à sac (Alain Cavalier). Vivre la nuit (Marcel Camus). 1968 : Le Tatoué (Denys de La Patellière). La Voie lactée (Luis Buñuel). 1969 : Élise ou la Vraie Vie (Michel Drach). 1970 : Les Assassins de l’Ordre (Marcel Carné). Domicile conjugal (François Truffaut). 1972 : Beau Masque (Bernard Paul). Le Charme discret de la bourgeoisie (Luis Buñuel). 1973 : France Société Anonyme (Alain Corneau). 1974 : Le Fantôme de la Liberté (Luis Buñuel). Vincent, François, Paul… et les autres (Claude Sautet). 1975 : Le Téléphone rose (Édouard Molinaro). 1976 : Comme un boomerang (José Giovanni). Le Pays bleu (Jean-Charles Tacchella). 1977 : Et vive la liberté (Serge Korber). 1979 : L’Œil du maître (Stéphane Kurc). Le Pull-over rouge (Michel Drach). 1980 : Un mauvais fils (Claude Sautet). 1981 : Garde à vue (Claude Miller). 1982 : Cap Canaille (Juliet Berto et Jean-Henri Roger). 1984 : Tant que farem atal (Roger Souza, CM, également auteur du scénario). 1986 : Le Débutant (Daniel Janneau). 1988 : La Petite Voleuse (Claude Miller). Trois Places pour le 26 (Jacques Demy). 1989 : Le Château de ma mère (Yves Robert). Cyrano de Bergerac (Jean-Paul Rappeneau). La Gloire de mon père (Yves Robert). Le Provincial (Christian Gion). 1990 : Triplex (Georges Lautner). 1991 : Les Baigneurs (Jean-Marie Larrieu, CM). 1997 : Alice et Martin (André Téchiné). Fin d’été (Arnaud Larrieu et Jean-Marie Larrieu). 2001 : Naturellement (Christophe Le Masne, CM). 2002 : Toujours tout droit (Manuel Moutier, CM). 2003 : L’Anniversaire de Lulu (Patrick Dhaussy, CM). 2004 : Noli me tangere (François-Xavier Vives, CM).

LIENS VIDÉO :

www.ina.fr/divertissement/chansons/video/I06054331/pierre-maguelon-au-petit-conservatoire.fr.html (Petit-Bobo au Petit Conservatoire de Mireille).

www.youtube.com/watch?v=2-mWSmBs_i0 (Les Assassins de l’Ordre, Marcel Carné, 1970 : extrait).

www.thalia.ch/shop/home/artikeldetails/der_diskrete_charme_der_bourgeoisie_arthaus_premium.html (Le Charme discret de la bourgeoisie, Luis Buñuel, 1972 : bande-annonce sous-titrée en allemand).

www.youtube.com/watch?v=5BPSc5m39EQ (Le Fantôme de la Liberté, Luis Buñuel, 1974 : extrait).

www.dailymotion.com/video/xccuzw_generique-les-brigades-du-tigre_shortfilms (Les Brigades du Tigre : générique de l’épisode La Main noire, Victor Vicas, 1974).

www.dailymotion.com/video/x32mvq_garde-a-vue-schneiderventuraserraul_shortfilms (Garde à vue, Claude Miller, 1981 : extrait).

www.dailymotion.com/video/xu7oo_la-guerre-de-troie-naura-pas-lieu_fun (La Guerre de Troie n’aura pas lieu, mise en scène au Théâtre Silvia-Monfort par Nicolas Briançon, 2006).

© Armel de Lorme